Une carotte pour les maires bâtisseurs (avant le bâton?)

© Grand Paris et petits détours. Blog de Libération par Sybille Vincendon

On l’oublie parfois mais le Grand Paris comporte un volet logement. Il est  inscrit dans la loi du même nom, qui prévoit la construction de 70 000 logements par an en Ile-de-France. On en est actuellement à 40 000, ça donne une idée du chemin à parcourir. Surtout pour les élus qui sont nombreux à traîner des pieds.

Aussi le préfet de région Daniel Canepa a-t-il profité d’un séminaire sur les contrats de développement territorial (CDT) pour annoncer une mesure d’encouragement. « Soyons ensemble constructifs, a-t-il exhorté devant une vaste assemblée d’élus locaux. L’Etat veut 70 000 logements: c’est un objectif à notre portée. J’ai donc travaillé avec Benoist Apparu (secrétaire d’Etat au Logement, ndlr) et Gilles Carrez (rappporteur du budget à l’Assemblée nationale) à un fonds susceptible d’encourager. L’idée: donner un bonus aux communes qui s’engagent au delà des objectifs de leur plan local de l’habitat ».

Cela suffira-t-il? Entre les réfractaires de la SRU, qui préfèrent pour certains payer des amendes plutôt que de construire des logements sociaux, et l’inertie courante en Ile-de-France, on peut s’interroger sur la portée de l’incitation financière. Comble de malchance pour le préfet, Benoist Apparu, lui, venait de remettre en cause  le seuil des 20% HLM de la loi SRU. Le message risque d’être un peu confus.

Or, le préfet était cet après-midi en mission séduction. Après l’accord transports qui a abouti au lancement du Grand Paris Express, il faut maintenant aborder la mise en place des contrats de développement territorial, « l’instrument technique avec lequel nous faisons naître le Grand Paris ». Le CDT est « une sorte d’objet non identifié, nouveau et équivoque », a philosophé le préfet. Qui a ajouté: « Il faut y voir une rencontre entre l’Etat et toutes les collectivités locales ».

Une rencontre à mener avec doigté. Ces contrats  prévoient le développement urbain autour des 57 nouvelles gares du réseau de Grand Paris Express. Neuf territoires de projet ont été identifiés, sur lesquels il devrait y avoir 17 CDT. Ils concerneront le logement, le transport, l’urbanisme en général et le développement économique. Sur ce dernier point, on retrouve la logique de clusters qui faisait rêver l’ancien secrétaire d’Etat au Développement de la région capitale Christian Blanc.  Chaque pôle de CDT est en effet spécialisé, par exemple sur la création pour Plaine commune. Cette façon de faire doit « donner une identité à l’international ».

Pierre Mansat, adjoint au maire de Paris, a fait remarquer au passage que Paris en avait une, d’identité, même sur l’attractivité économique, et qu’il ne faudrait quand même pas « enfermer Paris dans la ville musée ». Il n’était pas le seul élu que le collier de clusters inquiétait. Plusieurs ont râloté lors des questions sur « le développement en taches de léopard », les« cellules sans tissu autour », le risque pour beaucoup de territoires hors contrat d’être abandonnés. Ce n’est pas totalement un fantasme. Les moyens de l’Etat seront « fléchés » en priorité sur les territoires de projet.

Le principe du CDT est la recherche du consensus. Des comités de pilotages sont mis en place, Etat et collectivités discutent. Et à la fin, on signe. Mais dans ce navire, le préfet est le capitaine. Il explique par exemple en ce moment à quelques communes de l’ouest qu’il ne signera pas un CDT qui privilégie l’implantation de bureaux. L’objectif de 70000 logements figurait dans le discours de Nicolas Sarkozy sur le Grand Paris et a été inscrit dans la loi. Le préfet Canepa est aussi en mission commando.

De toute façon, il y aura un aménagement autour des gares, qu’il y ait contrat ou non. La loi permet même à la Société du Grand Paris d’aménager elle-même le secteur dans un rayon de 400 mètres autour des gares du réseau qu’elle construit. Etienne Guyot, directeur général de la Société, a d’ailleurs précisé qu’il était en train d’acquérir 5500 parcelles le long du parcours du grand métro.

Dans le dossier qui a été remis aujourd’hui aux élus invités par le préfet, figurait une étonnante « Foire aux questions », sorte de mode d’emploi de la fonction de maire en Ile-de-France au temps du Grand Paris. C’était sûrement destiné à déminer les objections. Mais peut-être aussi à rappeler qu’il allait falloir s’y mettre.

 

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