Paris: Sarkozy voit grand
© Le JDD.fr, 29.04.09, Christophe Israël
Nicolas Sarkozy a lancé mercredi le Grand Paris. Lors de son discours prononcé depuis la Cité de l’Architecture à Paris, le chef de l’Etat a présenté les grandes lignes de l’aménagement de la métropole capitale, estimé à 35 milliards. Les travaux doivent démarrer en 2012 et durer dix ans. Au menu: un métrophérique, 1,5 million de logements d’ici 2030 et une refonte du code de l’urbanisme.
« Il faut voir grand« . Le leitmotiv choisi par Nicolas Sarkozy pour présenter son projet de Grand Paris se devait d’être consensuel. Mercredi, dans un discours prononcé depuis la Cité de l’Architecture à Paris, le chef de l’Etat a insisté sur la nécessité de dépasser les clivages politiques, esthétiques et architecturaux pour bâtir la ville de demain. Là où ses prédécesseurs avaient inscrit leur marque dans le paysage urbain – du centre Pompidou au quai Branly en passant par la grande Bibliothèque-, Nicolas Sarkozy propose lui de le repenser entièrement. Collectivement, et sans s’interdire le « beau » ou le « grand« .
Le président de la République a commencé par poser les principes qui devaient conduire la réflexion. Une volonté affirmée de « rompre avec le fonctionnalisme » pour refonder une ville qui « mélange et réunit« , permettant de concilier les impératifs du développement « durable » et la restauration du « lien social » et de la « solidarité« . Avant de détailler les différents axes de son projet, Nicolas Sarkozy a évacué la question de la réforme institutionnelle et administrative, comprendre une éventuelle fusion de départements.
« La Seine, axe nourricier de la métropole«
Il a ensuite énuméré la (longue) liste des directions que devra prendre le projet: une organisation intégrant la vallée de la Seine et le port du Havre, dont Nicolas Sarkozy veut faire « le port du Grand Paris« . Un « choix stratégique que nous dicte la géographie« , selon le chef de l’Etat, pour qui la Seine est « l’axe nourricier autour duquel la métropole a vocation à s’ordonner« . Un déterminisme géographique qui ne sera certainement pas du goût de tous les acteurs de l’aménagement.
Mais, outre quelques annonces attendues -voire redoutées-, comme le déplacement de la cité judiciaire aux Batignolles ou la proposition d’une nouvelle forêt à Roissy, c’est principalement sur les thèmes du logement et des transports que son discours a porté, et que l’effort de l’Etat sera mis.
1,5 million de logements, des transports repensés
Nicolas Sarkozy a estimé à « 70 000 logements par an, soit ?plus du double du rythme actuel’« , le nombre de constructions à réaliser pour atteindre l’objectif d’1,5 million de logements nouveaux à l’horizon 2030. « L’obstacle n’est pas dans la rareté du foncier« , a affirmé M. Sarkozy en recensant 200 km2 de superficies disponibles. « Il faut libérer l’offre. Dérèglementer, élever les coefficients d’occupation des sols (…), permettre à chaque propriétaire d’une maison individuelle de s’agrandir (…), rendre constructible les zones inondables mais par des bâtiments adaptés », a lancé le président de la République. « Le problème, c’est la réglementation« , a-t-il aussi estimé, annonçant une prochaine refonte du droit de l’urbanisme: « Nous en débattrons devant le parlement« .
C’est incontestablement le volet « Transports » qui est au c?ur du futur Grand Paris. Des pistes de réflexion fortes ont été lancées: fonctionnement la nuit des transports en commun, tarification unique pour tous les Franciliens, une régulation unique du trafic RATP-SNCF? Mais surtout, 35 milliards d’euros investis, dont 21 milliards consacrés à un réseau automatique rapide qui reliera sur 130km les différents pôles extra-muros, le fameux Métrophérique, aérien le plus souvent possible: un tramway sans chauffeur circulant à 80km/h minimum, 24 heures sur 24. Le prolongement de la ligne 14, d’Eole jusqu’à la Défense et une liaison rapide Roissy-Gare du Nord ont de même été actés.
Les socialistes satisfaits
Un projet entendu par le maire de Paris et le président de la région Ile-de-France, tous deux socialistes. Bertrand Delanoë s’est dit « satisfait d’une évolution positive qui marque une rupture avec ce que faisait l’Etat ces dernières années » et a dit croire en la « sincérité » de « l’engagement pour le logement et les transports« . Un avis partagé par Jean-Paul Huchon, qui attend toutefois que « l’Etat mette de l’argent sur la table« .
Seul déçu, le président socialiste du conseil général du Val d’Oise. Didier Arnal, s’est dit « inquiet » d’être oublié. A l’exception de la proposition de « planter une nouvelle forêt d’un million d’arbres » à Roissy-en-France- un poumon vert qui permettrait de capturer « 13 tonnes de carbone par an« -, son département est le grand absent des tracés ferroviaires prévisionnels. Soit un centième de l’impact actuel de la consommation et des déchets de la Ville de Paris.
Le chef de l’Etat a fixé un calendrier précis. Outre des « états généraux du Grand Paris » Gd Paris début 2010 – « l’Etat qui ne décide pas seul, mais donne l’impulsion« -, Nicolas Sarkozy a fait part de sa volonté de voir les travaux débuter avant 2012, et durer 10 ans. Avant fin 2009, une « loi fixant les modalités de maitrise d’ouvrage, les outils juridiques et les moyens de financement » sera proposée; les discussions sur le schéma de transport devront elles aboutir à un accord « avant l’été« .