Blanc de rage contre Fillon
© Libération, Alain Auffray
Grand Paris . Le secrétaire d’Etat à la Région capitale dénonce dans un courrier à Matignon des modifications apportées à son projet.
Christian Blanc, le secrétaire d’Etat à la Région capitale, a-t-il failli démissionner hier ? Il a en tout cas piqué une colère lundi et l’a exprimée, fait rare, dans un courrier au Premier ministre à la limite de la mauvaise éducation politique.
En jeu, le projet de loi du Grand Paris, élaboré par Christian Blanc. Le texte a été modifié à Matignon avant sa transmission, aujourd’hui, au Conseil d’Etat. Et les changements ont ulcéré l’auteur. « J’estime que le document transmis à votre cabinet samedi soir est le seul document qui puisse être transmis au Conseil d’Etat », écrit-il dans une sèche missive révélée par l’AFP. Et d’enchaîner : « Je vous demanderais de surseoir à la transmission au Conseil du document amendé par votre cabinet ».
De ces fortes injonctions, le Premier ministre n’a naturellement tenu aucun compte. Ce qui a nourri hier la rumeur d’une démission du secrétaire d’Etat. Son directeur de cabinet a aussitôt démenti : il n’était « question ni de près ni de loin » que le ministre plie bagage. La lettre participait, selon lui, « au jeu normal d’explication à l’intérieur d’un gouvernement ». A Matignon, on s’efforçait également de banaliser : le Premier ministre n’a fait, comme c’est l’usage, que « rendre un arbitrage sur un dossier interministériel ».
Le ton de « l’explication » surprend quand même. « On ne peut pas établir un rapport de force avec le Premier ministre ! », dit un acteur du dossier assez effaré.
Pourquoi ce coup de calcaire ? Le projet de Christian Blanc marchait sur la tête des collectivités locales pour bâtir au plus vite le grand métro circulaire. Début septembre, Bertrand Delanoë avait écrit à François Fillon pour le mettre en garde contre la mise en œuvre d’un « régime juridique d’exception » qui porte « directement atteinte aux compétences des élus parisiens ». Les élus de gauche étaient loin d’être les seuls à juger que le projet donnait beaucoup trop de pouvoirs à « l’Etat stratège », notamment pour l’aménagement de quartiers autour de quelque 40 futures gares.
Le 11 septembre, devant de nombreux élus locaux réunis à Pierrefitte, le Premier ministre avait promis que le projet de loi sur le Grand Paris prendrait « scrupuleusement en compte les résultats de la concertation ». Il avait invité les élus franciliens à un
« dialogue constructif » au service « d’un projet qui nous transcende ».
Valérie Pécresse, candidate UMP à la présidence de la région Ile-de-France, se félicitait hier soir « du nouvel équilibre décidé par le Premier ministre ». Manière de rappeler que le projet de Christian Blanc était, lui, déséquilibré. Lors de nombreuses réunions avec les élus franciliens, la candidate UMP avait promis de se battre pour faire entendre la voix des collectivités territoriales. François Fillon l’a, en tout cas, un peu entendue.