Au seuil des péages urbains
© Libération, Guillaume Launay
Automobile . Le Sénat a adopté hier soir un amendement permettant de rendre payant l’accès aux plus grandes agglomérations françaises.
Les automobilistes paieront-ils un jour pour descendre les Champs-Elysées ? On n’en est pas encore là mais l’idée du péage urbain progresse en France. Le Sénat a adopté hier soir un amendement à la loi Grenelle 2 qui permet de tester ce système (impossible jusqu’ici) « à titre expérimental », dans les agglomérations de plus de 300 000 habitants, soit une dizaine en France. Un amendement prudent, sous conditions, basé sur le volontariat des collectivités, qui n’est, selon son auteur, qu’une « première étape ».
Pourquoi aujourd’hui ?
« Il appartiendra [aux collectivités locales] de librement décider de la possibilité de créer des péages urbains. » A l’automne 2007, dans l’euphorie du Grenelle de l’environnement, Nicolas Sarkozy était prêt à tenter l’expérience. Inscrite dans l’avant-projet de loi Grenelle 2, l’idée avait disparu dans la version définitive. Avant de revenir par la grâce d’un amendement du sénateur UMP Louis Nègre. « Les mentalités évoluent fortement », décrypte ce dernier.
à quoi ça sert ?
« Si toute l’Europe s’y met, il doit y avoir une raison », juge Louis Nègre qui a fait cet été la tournée des métropoles ayant mis en place un tel système (voir infographie). Mi-source de revenu, mi-outil politique… le tout est de bien choisir ses priorités. « Historiquement, rappelle le Centre d’études sur les réseaux, les transports, l’urbanisme et les constructions publiques (1), les péages ont été mis en place pour financer les infrastructures de transport. » Depuis, l’accent est plus mis sur la lutte contre la congestion et la pollution.
Est-ce que ça marche ?
A la lumière des expériences de Londres et Stockholm, le Certu juge les résultats « assez concluants » sur le trafic routier, avec des baisses d’au moins 15%. Mais l’étude pointe le manque de recul pour tirer un bilan définitif. « C’est plus intéressant pour lutter contre la congestion que pour dégager des ressources, pointe Louis Nègre. Ce n’est qu’un outil dans une boîte pour mieux gérer le milieu urbain. »
Paris s’y mettra-t-il ?
L’opposition UMP va demander aujourd’hui au conseil de Paris de mettre le sujet à l’étude. « Il ne s’agirait pas d’une barrière d’octroi [taxe sur les marchandises perçue autrefois à l’entrée en ville, ndlr] mais d’une réflexion dans le cadre du Grand Paris, défend l’UMP Thierry Coudert. Il va bien falloir trouver de l’argent pour les transports en commun. » Pour l’instant, la mairie est réticente. « Nous sommes opposés à un péage qui conduirait à faire payer l’accès à Paris et à créer de la ségrégation urbaine », argumente Annick Lepetit, adjointe aux transports. Qui préférerait rendre payant le réseau autoroutier francilien, pour les poids lourds dans un premier temps. Les autres métropoles hexagonales n’étant pas non plus très demandeuses, le débat n’en est sans doute qu’à ses débuts.
(1) « Péages urbains, permettre leur expérimentation en France », Certu, juin 2008.
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