Grand Paris : Sarkozy détaille son projet capital

©2009 Liberation, Sibylle Vicendon

Région . Le chef de l’Etat s’empare du dossier qu’il a longtemps délaissé.

Pendant des années, Nicolas Sarkozy a été aux abonnés absents sur le Grand Paris. Il avait bien évoqué la création d’une communauté urbaine autour de Paris, mais après plus rien. Pas un mot et mystère sur ses intentions. Au grand énervement des élus, régionaux en particulier.

Le 29 avril, premier discours présidentiel et premières indications : le Président aime le Grand Paris, adore les travaux des dix équipes d’architectes consultées et fera le métro géant préconisé par le secrétaire d’Etat à la Région capitale, Christian Blanc. Un jouet à 35 milliards d’euros. Le député (UMP) Gilles Carrez est chargé d’aller dégotter les financements.

Hier, deuxième discours, à la Défense, «la City de la France», dixit le Président. Autour de lui, les ministres Borloo (Equipement), Pécresse (Enseignement supérieur), Blanc, les deux présidents de la SNCF (Guillaume Pepy) et de la RATP (Pierre Mongin). Plus quelques notables locaux. Patrick Devedjian, ministre de la Relance, joue les animateurs dans un mode Drucker assez réussi.

Accélération. Et voilà que tombent de nouvelles précisions. Il y aura à l’automne, promet le chef de l’Etat, «un projet de loi pour piloter le projet du Grand Paris, parce que l’ampleur des enjeux doit faire prévoir d’autres procédures». Le but est d’aller plus vite. Nicolas Sarkozy ne veut plus se trouver dans ces situations «où on inaugure des lignes de trains décidées il y a vingt-cinq ans». Et de s’enflammer sur l’exemple de Strasbourg, défendue comme ville du Parlement européen «par tous les élus, de droite, de gauche, et qui a attendu le TGV pendant vingt-huit ans». La Défense, sujet du jour, doit recevoir une ligne TGV venant de Normandie et promise le 29 avril par le Président. La loi prévoira aussi des périmètres autour des gares pour des solutions d’aménagement plus imaginatives, inspirées des dix équipes d’architectes. Mais, attention, «je ne souhaite pas du tout une dérégulation, pas du tout…» a souligné le Président. Et l’accélération des procédures ne supprimera ni l’enquête publique ni le débat public.

Qui va construire le grand métro de Blanc ? Probablement pas le Syndicat des transports d’Ile-de-France, le Stif, instance présidée par la région. «Nous allons créer un établissement ou une société à capitaux publics pour assurer la maîtrise d’ouvrage», a expliqué Nicolas Sarkozy. Il préférerait d’ailleurs «une société, qui permettrait d’associer les communes et les collectivités locales».

La région, présidée par Jean-Paul Huchon, serait-elle dépossédée ? A la sortie, le socialiste ne se plaignait de rien. Tout ce qui l’avait tant fâché dans l’attitude de l’Etat ces derniers mois semblait avoir disparu. Le Schéma directeur d’Ile-de-France (Sdrif), que l’Etat bloque depuis des mois, «sera approuvé, assure-t-il, et nous le mettrons en révision pour tenir compte du plan de transports du gouvernement». Nicolas Sarkozy lui-même avait souligné que le président de la région avait rencontré Claude Guéant, le secrétaire général de l’Elysée, la veille au soir. On est loin des conférences de presse furieuses où Jean-Paul Huchon se plaignait de l’attitude de l’Etat.

Visionnaire. Sur les financements des nouveaux tronçons de métro, on attendra les conclusions de Gilles Carrez. «Juste une piste, a quand même concédé le Président. Quand on multiplie les transports collectifs comme nous allons le faire, on crée une valeur accrue du mètre carré. Eh bien, nous prélèverons une part de cette valorisation.» Sans doute pas suffisant vu l’ampleur des montants.

Mais Nicolas Sarkozy se veut désormais le visionnaire du Grand Paris. Il reprend l’exemple de la Défense : «Est-ce que notre génération saura être à la hauteur de ceux qui nous ont précédés ? Ici, on traversait un bidonville pour aller au stade de Colombes. Ils ont fait de rien quelque chose d’extraordinaire. Ce n’est pas plus ambitieux de faire le Grand Paris que la Défense à l’époque.» Aux architectes qui ont participé à la consultation du Grand Paris, il adresse ses félicitations pour ce travail «exceptionnel». Il défend les tours quand elles sont belles : «La beauté, c’est subjectif, mais c’est une question pour le politique.» La preuve par Louis XIV : «Quand il a créé Versailles, ça a fait polémique. Mais si on calcule ce que ça a rapporté, à mon avis, c’était un bon investissement.»


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