« Paris à l’air libre »

©Le Moniteur,revue en ligne, tous droits réservés.

Article de Frédéric Lenne

Des mots ciselés de nature à donner de l’oxygène à la métropole. Ainsi s’exprime Frédéric Lenne, directeur du département Architecture et urbanisme du Groupe Moniteur, au sujet du discours de Nicolas Sarkozy sur le Grand Paris.

Que ceux qui auraient été oubliés lèvent le doigt! En détaillant à la Cité de l’architecture et du patrimoine, ce 29 avril, sa vision d’un Grand Paris, le président de la République n’a, en fait, oublié personne. Son discours avait été écrit avec une précision d’orfèvre. Premiers acteurs concernés, les membres des dix équipes qui ont planché sur le sujet et dont les travaux sont maintenant exposés, ont tous retrouvé dans les mots de Nicolas Sarkozy plusieurs éléments issus de leur recherche. Aucun nom d’architectes n’a été cité mais tous ont reconnu leur bébé dans la bouche du président. Le tout distillé avec assurance et détermination, comme s’il n’y avait plus qu’à… commencer tout de suite.
Quand un discours est très attendu, il a toutes les chances de décevoir. Celui sur le Grand Paris risquait de nous laisser sur notre faim en ne se concentrant que sur les transports. Ce fut loin d’être le cas. Mais, sur ce registre, il contenait une divine surprise. Si le projet d’un métro de 130 kilomètres, cher à Christian Blanc, a reçu – comme on pouvait s’y attendre – l’onction présidentielle, il l’a reçue avec un formidable « codicille » : que ce métro soit aérien là où c’est possible!
Le forage en grande profondeur d’une immense boucle n’est donc plus tout à fait à l’ordre du jour. Il aurait donné lieu à des exploits techniques mais constituait un défi au bon sens. Il aurait surtout privé les voyageurs du plaisir cinétique de la ville. On ne peut donc qu’applaudir à cette préférence donnée aux liaisons de surface, à l’air libre, « là où c’est possible ». Reste à définir où ce possible sera. Sans facétie, la réponse est : partout! Certes avec une toute petite nuance : partout ou presque. Mais dans le presque, ne subsiste que quelques enjambements aériens trop ardus qu’il vaudra mieux éviter par le sous-sol.
L’attente suscitée par ce discours aurait aussi été déçue s’il n’avait laissé entrevoir qu’un projet urbain figé, ou déséquilibré, ou sans relief. Ce risque a été évité par l’énoncé d’un catalogue dense qui ne constitue pas un projet global mais un programme avec des objectifs à atteindre, un début de calendrier, voire des premiers chiffrages. Un programme avec un nombre impressionnant de projets, qui embrasse tout, au nord comme au sud, à l’est comme à l’ouest. Chacun peut y trouver du grain à moudre et si la moitié de ces projets est menée à bien dans les dix ans, ce sera déjà extraordinaire !
Ce programme, enfin, a la caractéristique de se vouloir au-delà de tout clivage politique. Ce qui n’est pas une mince affaire mais a l’immense mérite de consacrer la prééminence du projet sur les questions administratives. Ainsi, Nicolas Sarkozy vient-il d’impulser une dynamique territoriale pour faire du Grand Paris une ville-monde.
Une ville-monde qui incarne, par la grâce d’une référence à Victor Hugo, « le vrai, le beau, le grand » auxquels le président de la République ajoute « le juste ». Il se pose ainsi en héraut de la ville durable qu’il considère comme le plus grand défi politique du XXIe siècle. Il parle de forêts, d’agriculture et de bâtiments passifs dans une ville décongestionnée qui n’exclurait pas les plus faibles. La consultation des équipes pilotées par des architectes a porté ses fruits. Tout peut commencer pour que Paris se dote des moyens de vivre bientôt à l’air libre.

Frédéric Lenne, directeur du département Architecture et urbanisme du Groupe Moniteur

Commentaires fermés

%d blogueurs aiment cette page :