Grand Paris : 35 milliards pour les transports, et puis et puis et puis….

©Cadre de Ville, revue en ligne

Le discours de Nicolas Sarkozy (lire ci-dessous) a listé les points sur lesquels il souhaite une transformation forte et rapide (« en dix ans ») de la région parisienne. Les premières commandes aux urbanistes commencent de fait à être passées. Le « groupe des dix » équipes sera maintenu suivant des modalités non encore précisées.

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Chacun devrait y retrouver les siens… Dans un discours ô combien attendu, prononcé mercredi 29 avril lors de l’inauguration de l’exposition de la Cité de l’Architecture et du Patrimoine consacrée au Grand Paris, Nicolas Sarkozy a réussi, en brassant large, à ne froisser personne. Pas d’annonce tonitruante, pas de grande surprise mais quelques précisions. Tour à tour guide et architecte d’un Paris renouvelé et étendu au-delà du Périphérique, au-delà de la première couronne et au-delà des frontières de l’Ile de France, -avec un souriant  « Mon cher Jean-Paul… »-,  le président de la République a listé d’innombrables projets piochant tour à tour dans les dossiers des dix équipes d’architectes et dans les viviers d’idées des collectivités locales.

Depuis la transformation de la Seine en un grand boulevard urbain du Havre jusqu’à Paris, axe du dossier de l’équipe Grumbach, jusqu’à la possibilité offerte aux propriétaires particuliers de densifier leurs pavillons en les rehaussant, idée chère à Yves Lion, il a passé en revue toutes les échelles en resserrant progressivement son propos sans oublier personne.  Jean Nouvel retrouvera ses tours, Christian de Portzampac ses îlots ouverts, Winy Maas  ses forêts, Richard Rogers, le comblement des tranchées ferroviaires béantes dans la ville, Roland Castro ses monuments à la démocratie, Bernardo Secchi son maillage fin… De même, les sites stratégiques de la « ville-monde » ont été pointés: au sud, Saclay recevra 850 millions d’Euros pour devenir l’un des tout premiers pôles mondiaux de recherche scientifique ; au nord, un pôle de la création (dans la plaine Saint Denis) ; à l’ouest la Défense est identifiée comme la cité financière dotée d’une gare TGV et accessible par le prolongement d’Eole ; à l’Est, la spécialisation portera sur la ville durable, les élus de Marne-la-Vallée attendaient avec impatience cette allusion qui conforte leurs espoirs. Au passage, le destin de l’avenue Charles-de-Gaulle à Neuilly est une évidence : « il faut l’enfouir ».

Autres questions tranchées ou confirmées, la Cité Judiciaire sera construite aux Batignolles, celle de la Défense Nationale à Balard. Tout à son enthousiasme, comme pour faire taire les critiques contre la cacophonie régnant autour « des » Grands Paris, le Président a clairement tendu la main aux maires, et à tous les maires, sur un ton plus cordial que celui qu’employait encore récemment Christian Blanc, son secrétaire d’Etat chargé du développement de la région capitale.

Transports : chacun ses projets

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Le président s’est montré plus précis sur le chapitre des transports, indispensable au développement économique de la métropole, sans jamais évoquer la question de la mobilité électrique développée par plusieurs équipes comme un mode de déplacement économe et l’occasion de refaçonner l’espace urbain. Le projet est un double anneau ferré, bouclé à quelques nuances près : la rocade tournera bien autour de Paris sur 130 kilomètres, mais elle sera « aérienne, là où cela est possible ». Ce réseau primaire viendrait s’ajouter –et non se substituer-  au plan figurant au SDRIF comprenant « Arc Express », la rocade de métro de 60 kilomètres imaginée par la Région, au coût estimé de 18 milliards d’euros, pour l’instant sans financement confirmé de l’Etat. 

Au total, l’Elysée évalue à 35 milliards d’euros la nécessaire et urgente modernisation des transports. Cet énorme investissement ne sera pas confié à la Région pourtant en charge des Transports publics, ni assumé par l’Etat. C’est au secteur privé, par le biais des partenariats publics privé, qu’il reviendra de financer ces infrastructures et à Gilles Carrez, député du Val-de-Marne d’en mettre au point les nouvelles modalités de financement et les outils juridiques. Un texte est attendu pour octobre. Le président a également évoqué la valorisation foncière, autrement dit une taxe sur la rente apportée aux propriétaires privés, par l’installation d’équipements publics comme des gares dont la présence a pour effet une immédiate plus-value immobilière. Les entreprises publiques assises sur leurs terrains en friche seront également mises à contribution.

L’Etat se donne les moyens juridiques d’agir

Décidé à partager le pouvoir, l’Etat exige en contrepartie l’assurance de pouvoir mener à bien son action : déréglementer, accélérer les procédures, dézoner pour libérer le sol et doubler la construction annuelle de logements… sont des idées anciennes très résistantes au passage à l’acte. L’ambition de gommer du jour au lendemain des décennies de pratiques administratives et urbaines est à la hauteur de celle de réaliser « un grand Paris en dix ans ». Il faut s’attendre à une nouvelle loi, la sixième en six ans.

Projets, méthodes, appel au consensus et à l’union sacrée… Il manque un maillon à la chaîne, maillon que Nicolas Sarkozy a repoussé sine die. Le Grand Paris peut-il se construire sans une remise à plat de la gouvernance ? Juste avec un président qui, ici aussi, déclare qu’il s’occupe de tout ? Comment ne pas voir là, après plusieurs signaux amicaux adressée à la Région, un signe aussi clair mais inverse en direction du Syndicat Paris Métropole, émanation de la Ville de Paris, dont l’objet est précisément la réflexion sur ce sujet ?
Catherine Sabbah

 

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