Grand Paris : le sénateur Dallier ne fait pas de quartier
Sibylle Vincendon. © Libération tout droit réservés
Philippe Dallier est un homme qui met des beignes avec le sourire. En présentant hier le rapport sur le Grand Paris qu’il a élaboré pour l’Observatoire de la décentralisation du Sénat, ce jovial élu UMP de Seine-Saint-Denis en a distribué de tous les côtés. Sous l’intitulé « Les scénarios inacceptables », il range nombre de solutions prônées ces derniers temps par les acteurs du débat. Le syndicat mixte de Roger Karoutchi, chef de file de l’UMP régionale ? C’est, pour Dallier, « l’absence d’ambition ». Les intercommunalités autour de Paris préconisées par la région et par le communiste Patrick Braouezec ? C’est « le refus d’une ambition commune ». Quant à la communauté urbaine, évoquée le matin même par Patrick Devedjian, président UMP des Hauts-de-Seine, elle « compliquerait encore plus » la gouvernance parisienne.
En 2011, deuxième temps. Nouvelle loi pour créer le Grand Paris, le vrai, avec des compétences limitées, logement, transports collectifs de l’agglomération, développement économique, sécurité. Tout ce que gèrent aujourd’hui les départements et qui n’est pas dans cette liste, serait restitué soit aux communes (gestion de l’action sociale), soit à la région (les collèges et les routes).
Ensuite, attention la secousse, élection au suffrage universel direct d’un maire du Grand Paris, rien moins. On supprime « l’institution du maire de Paris », et on émancipe les arrondissements qui récupèrent des pouvoirs de vraies communes. A l’Hôtel de Ville, on maintiendrait les compétences « qui serviraient à la fois au Grand Paris et aux arrondissements ». C’est, écrit Philippe Dallier, « le scénario le plus révolutionnaire ». En effet. D’autant qu’il s’accompagne d’autres petites brutalités. Ainsi, les intercommunalités actuelles de la première couronne sont-elles priées de se dissoudre. « Elles n’ont pas de sens », a dit hier le sénateur qui, décidément très en forme, a souligné que le rapprochement Sèvres-Boulogne, à droite, ne servait qu’à échapper au versement d’une taxe, et que Plaine-Commune, l’intercommunalité à dominante communiste autour de Saint-Denis, n’avait pas réussi à intégrer sa voisine Saint-Ouen, « pourtant du même bord ».
Prévoyant tout ou presque, le rapporteur détaille la gestion du logement par le Grand Paris (avec objectifs de construction chiffrés et obligatoires pour les communes), la création d’un préfet de police du Grand Paris, d’une académie du Grand Paris, d’une agence foncière du Grand Paris, d’une agence de développement économique du Grand Paris. Entres autres.
Christian Blanc, le nouveau secrétaire d’Etat à la Région capitale, se voit ainsi livrer un mode d’emploi complet. Réaliste ? C’est moins sûr : dissoudre des collectivités locales reste inédit.
- Sibylle Vincendon