Les dossiers prioritaires

Tonino Serafini © Libération

Paris et la première couronne concentrent l’essentiel des problèmes.

Logement la grande panne

Loyers inabordables, prix de l’immobilier explosifs, ruée des demandeurs aux guichets des HLM, manifestations et campements de mal-logés : tous les clignotants du logement sont au rouge en Ile-de-France. Le diagnostic de pénurie n’est contesté par personne. La crise dure depuis une bonne quinzaine d’années. « Elle alimente le sentiment de mal de vivre des Franciliens », reconnaît Roger Karoutchi, ministre chargé des Relations avec le Parlement et chef de file de l’UMP au conseil régional. Mais un constat s’impose : les pouvoirs publics (à commencer par les maires et l’Etat) n’ont jusqu’à présent rien entrepris de sérieux pour remédier à une situation alarmante.

Il manque au bas mot 200 000 logements en Ile-de-France. La pénurie alimente la hausse des prix, et 370 000 ménages sont inscrits aux fichiers des demandeurs de HLM.

Alors que la construction est repartie partout (431 000 logements mis en chantier l’an dernier dans l’Hexagone), l’Ile-de-France reste à l’écart de ce mouvement avec seulement 36 834 logements lancés en 2006. L’Ile-de-France détient désormais le bonnet d’âne en matière de construction : elle produit 3 logements par an pour 1 000 habitants, contre 8 à 9 dans la plupart des autres grandes régions (Rhône-Alpes, Midi-Pyrénées, Bretagne, Languedoc-Roussillon, Pays-de-Loire, Aquitaine), où les élus locaux semblent un peu plus conscients de la nécessité de loger leurs habitants. La semaine dernière plusieurs associations d’aide aux mal-logés mais aussi des syndicats de salariés (CFDT, CFE-CGC, CGT) sont montés au créneau pour « dénoncer l’intolérable inertie » des pouvoirs publics. Dans leur texte, ils rappellent que, dans la plus riche des régions françaises, « des familles vivent à l’hôtel pendant des années », « des travailleurs pauvres dorment dans leur voiture » et « les sans-abri restent à la rue ».

Au-delà des dégâts sociaux qu’elle provoque, cette pénurie risque d’entraver le développement économique de la région. Quelle entreprise aura encore envie de s’y établir si ses salariés ne peuvent pas se loger ? Il n’est pas à exclure que des entreprises déjà installées en Ile-de-France finissent par se délocaliser dans des régions limitrophes, où la situation de l’habitat est moins dramatique. Lors de sa cérémonie des voeux pour 2008, le président du conseil régional, Jean-Paul Huchon, a raconté qu’il avait organisé récemment une rencontre avec des chefs d’entreprise sur le thème « économie, recherche et enseignement ». Mais à sa « grande surprise », cette réunion a « vite dévié sur la question du logement et des transports ». Les patrons lui ont demandé : « Comment pouvez-vous nous aider à loger nos salariés ? » Si le Sdrif (Schéma directeur de la région Ile-de-France) prévoit bien la réalisation de 60 000 logements par an pour faire face aux besoins, sur le terrain, les maires n’ont aucune obligation de faire. Focalisés sur la défense d’égoïsmes locaux, nombre d’entre eux construisent peu voire pas du tout. Et cette situation dure depuis l’adoption des lois de décentralisation. En la matière, l’Ile-de-France a besoin d’une autorité responsable qui prendrait à bras-le-corps ce dossier. D’aucuns considèrent que la création d’un Grand Paris doté d’une compétence logement serait une réponse pertinente à la situation d’incurie actuelle.

Arc express un métro périphérique

Pour l’instant, ce n’est qu’un projet. La réalisation d’une ligne de transport de rocade, autour de Paris, n’en est même pas encore au stade des esquisses. Le tracé reste à dessiner. On ne sait pas davantage quels seront les localités desservies, le nombre de stations et la distance d’une station à une autre. Néanmoins, un budget de 4 millions d’euros pour procéder à des études a été voté à l’unanimité en décembre dernier par le conseil d’administration du Stif (Syndicat des transports de l’Ile-de-France présidé par Jean-Paul Huchon, le patron PS de la région). Ce projet désormais inscrit au Sdrif est jugé « indispensable » par la très grande majorité des élus franciliens.

Baptisé Arc Express, cette ligne type métro-RER circulaire, distante de 3 à 5 km du périphérique parisien (voire plus) desservirait les départements de la petite couronne (Val-de-Marne, Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis). C’est un projet structurant puisqu’il s’agit de faciliter les déplacements de banlieue à banlieue, parent pauvre des transports collectifs franciliens. Arc Express viendrait contrecarrer la configuration en étoile des lignes SNCF, métro et RER d’Ile-de-France, qui convergent toutes vers le centre de Paris. Pour aller d’une banlieue à l’autre, la capitale est généralement un passage obligé. Arc Express est du coup une alternative pour ceux qui utilisent la voiture, pour ce type de déplacements, faute de transports collectifs pertinents.

Cette ligne circulaire, en partie souterraine et en partie à ciel ouvert, ferait 50 à 60 kilomètres. « Si l’on retient un coût réaliste de construction de l’ordre de 100 à 150 millions d’euros le kilomètre, ça coûterait environ 7,5 milliards », souligne Jean-Paul Huchon. L’investissement est énorme, et le président du conseil régional appelle de ses voeux l’Etat à se réengager dans le financement de ce type d’infrastructures. Arc Express serait réalisé par étape. Pour l’instant, seule la réalisation de deux « arcs » va faire l’objet d’études : le tronçon sud-est dans le Val-de-Marne (entre Val-de-Fontenay et Cachan) et le tronçon nord-ouest entre le quartier d’affaires de la Défense et la zone d’activité de la Plaine-Saint-Denis.

Des tours en bordure de Paris

« J’assume. » Bertrand Delanoë a choisi la campagne des municipales pour briser le tabou des tours à Paris. Depuis l’arrêt des constructions d’immeubles de grande hauteur au milieu des années 70, aucun candidat à l’Hôtel de Ville n’osait faire de ce dossier un thème électoral de peur d’y laisser des plumes. Après une première et timide tentative d’imposer à sa majorité l’ouverture d’un débat sur la « question des hauteurs », Delanoë avait été contraint à une marche arrière, sous la pression de ses alliés Verts – cohésion de la majorité municipale oblige. Lors de l’adoption du PLU (plan local d’urbanisme), le maire avait même dû accepter une réduction du coefficient d’occupation des sols (COS), c’est-à-dire le nombre de mètres carrés constructibles sur un terrain à bâtir. Dans les ZAC (zone d’aménagement concerté), qui échappent au droit commun, Delanoë avait encore dû plier et accepter dans ce même PLU un plafonnement des constructions à 37 mètres de hauteur maximum, sous la pression conjuguée des groupes UMP, Vert et Modem.

Mais ce n’était que partie remise. En 2006, le maire de Paris est revenu habilement à la charge en mettant en place un groupe de travail composé d’élus parisiens de toute appartenance »chargé de réfléchir aux nouvelles formes urbaines ». Ce groupe a fait plancher onze équipes d’architectes, sur l’aménagement de trois zones proches du périphérique : porte de la Chapelle (XVIIIe), porte de Masséna (XIIIe), porte de Bercy (XIIe).

Pour Jean-Pierre Caffet, l’adjoint (PS) au maire chargé de l’urbanisme, ces sites « sont adaptés pour monter en hauteur. Situés à proximité de la Seine, du périphérique ou d’emprises ferroviaires, ils offrent des dégagements énormes ». Les architectes ont rendu leur copie le 21 novembre dernier. Bertrand Delanoë a jugé, que les esquisses concernant Massena « dessinent des perspectives intéressantes qui méritent d’être approfondies ». Sur ce site, les architectes ont imaginé des immeubles de 20 à 50 mètres de hauteur pour les logements, et jusqu’à 150 mètres pour les tours de bureaux côté périphérique. Le projet devrait voir le jour quel que soit le prochain maire ; la candidate UMP Françoise de Panafieu a inscrit dans son programme la construction de 500 000 mètres carrés de surfaces dédiées aux bureaux, à l’artisanat et aux commerces, par le biais de programmes immobiliers comprenant notamment des tours.

  • SERAFINI Tonino

Votre commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Image Twitter

Vous commentez à l’aide de votre compte Twitter. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s

%d blogueurs aiment cette page :