Créer un espace de dialogue pour des projets communs
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La façon de gouverner la métropole, de coordonner les politiques publiques afin de répondre aux enjeux
d’aujourd’hui, a été posée avec force à plusieurs reprises.
La Ville de Paris propose la création d’une conférence métropolitaine à l’échelle de l’agglomération dense de l’Ile-de-France.
Paris, aujourd’hui, c’est à la fois une plus grande richesse pour certains et plus de précarité pour un nombre croissant d’habitants. Dans une tribune récente(1), la sociologue Marie-Christine Jaillet-Roman analysait que “ si le cœur historique des métropoles continue à se valoriser et à se qualifier socialement en accueillant la nouvelle strate des élites économiques et sociales, il héberge aussi les sans-abris et les populations les plus démunies. Il reste peut-être le “ centre ” mais ce centre inclut désormais les “ marges ”. Quant aux anciennes banlieues ouvrières de “ première couronne ” elles font l’expérience de destins sociaux qui se diversifient : certains connaissent un processus de “ gentrification ” et de reconquête qui tend à transformer leur peuplement et à les incorporer socialement à la “ ville-centre ”, tandis que d’autres continuent à accueillir ouvriers et nouveaux migrants. ”
Avec une augmentation de 28 % du nombre d’allocataires du RMI en trois ans, un taux de chômage supérieur depuis vingt ans à la moyenne nationale, Paris s’inscrit bien dans ce schéma.
Mais comment parler de métropole solidaire en laissant se développer en son cœur ce mouvement de concentration de la richesse d’un côté et de précarisation de l’autre ?
Le contrecarrer est l’objectif prioritaire de la Ville de Paris, mais c’est aussi un combat qui concerne l’ensemble de la métropole. D’autant que des phénomènes similaires se développent dans les autres collectivités, que les territoires d’aujourd’hui sont extrêmement imbriqués et que la vie n’y reflète plus le rapport traditionnel entre centre et périphérie.
Les Parisiens font de plus en plus leurs achats en banlieue et beaucoup s’y rendent quotidiennement pour travailler : le tiers de la population active parisienne, soit 300 000 personnes, travaille extra-muros, tandis que la moitié des 1,6 millions d’emplois de Paris est occupée par des personnes qui viennent de l’extérieur, ce qui pose des problèmes communs, de transport par exemple…
Une inadéquation profonde entre le territoire vécu et les institutions démocratiques qui le régissent
Or il y a une inadéquation profonde entre le territoire vécu de cette façon et les institutions démocratiques qui le régissent. En raison de leur histoire, elles sont inadaptées aujourd’hui à l’échelle de la métropole, et cette inadaptation introduit des éléments de tension de plus en plus forte. Il n’existe pas d’institution à l’échelle du territoire dense et c’est un vrai problème pour les politiques publiques.
La coopération intercommunale ou interdépartementale bilatérale entre Paris et ses voisins, pour nécessaire qu’elle soit, ne peut suffire et les intercommunalités se construisent, très légitimement, sans Paris. Pourtant, Paris possède 130 km de canaux et 8 000 unités foncières au-delà du Périphérique, certaines très vastes comme la plaine d’Achères, qui couvre 1 600 hectares.
Faire évoluer la gouvernance métropolitaine
Depuis 2001, la municipalité parisienne pose donc comme principe la nécessaire solidarité de l’ensemble de l’agglomération et comme objectif l’instauration d’un dialogue avec les autres collectivités, quelles que soient leur taille et leur couleur politique. Avec plus d’une quinzaine d’entre elles, nous avons déjà établi des liens de coopération solides, une conférence interdépartementale a été créée avec le Val-de-Marne, une autre avec la Seine-Saint-Denis sera bientôt sur pied… Mais il s’agit là de rapports bilatéraux encore insuffisants au regard des enjeux. Il faut aller plus loin, faire évoluer la gouvernance métropolitaine. Il ne s’agit pas de créer une nouvelle institution, mais d’instaurer une méthode de dialogue démocratique basée sur un mouvement volontaire des élus. Nous proposons qu’un tel dialogue se développe au sein d’une conférence de projets, une Conférence métropolitaine du cœur de l’agglomération parisienne.
(1) Revue Territoires, avril 2006.
Texte publié dans le numéro Hors série d’Extramuros consacré au Forum des autorités locales de périphérie, printemps 2006.
Pierre Mansat, adjoint au Maire de Paris chargé des relations avec les collectivités territoriales d’Ile-de-France